Plan européen de protection du système bancaire

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Depuis 2014, les mesures prises par les autorités Européenne et les pays membres de la Zone Euro se multiplient pour se prémunir contre une nouvelle défaillance d’une grande banque et un effondrement du système bancaire. Le too big to fail que l’on criait sur tous les toits avant la crise de 2008 semble désormais bien loin. Parmi les principales mesures, on peut citer la création d’un fond de résolution Européen, l’adoption par tous les Etats membres de la Directive sur le redressement et la résolution des crises bancaires (BRRD) et un système de garantie des dépôts. Ces mesures sont-elles vraiment efficaces ?


La directive sur le redressement et la résolution des crises bancaires (BRRD)



Cette directive vient d’être adoptée par tous les Etats membres depuis le 1er Janvier 2015. Elle permet le renflouement en interne d’une banque en difficulté. Si une banque risque la faillite, les actionnaires et les créanciers (détenteurs d’obligations) doivent supporter le cout du renflouement en interne. Les autorités Européennes veulent éviter que les contribuables et les épargnants mettent une nouvelle fois la main à la poche comme cela a été le cas avec la crise chypriote.
 
Pour rappel, en 2013, Chypre a connu une faillite généralisée de son système bancaire. Pour éviter un effondrement, les actionnaires et les créanciers ont été sollicités mais ca n’a pas été les seules. Les comptes des épargnants disposant de plus de 100 000€ ont été saisis et l’UE et le FMI ont du faire un chèque de 10 milliards d’euros. Ce sont donc les contribuables européens (c'est-à-dire vous) qui ont payé pour ce renflouement. Quand aux épargnants chypriotes, c’est un véritable racket organisé dont ils ont été victime. De quel droit saisit-on l’épargne des gens ??? C’est pour éviter un nouveau scandale que cette directive européenne a été adoptée.

Cette directive vient d’être utilisée début 2015 en Autriche qui a vu une de ses principales banques au bord de la faillite. L’Etat y était le principal actionnaire mais pour éviter de faire payer le contribuable (et aussi pour éviter de payer…), ce sont les créanciers (détenteurs d’obligations) qui ont supporté le poids du renflouement interne. Ce renflouement est resté sous silence, presque aucun média n’en a parlé.

Chaque banque au sein de la Zone Euro va devoir disposer d’un plan de renflouement. C’est une obligation européenne depuis l’adoption de cette directive. Pour éviter toute faillite bancaire, les autorités européennes ont alors les pleins pouvoirs pour restructurer et pour appliquer le plan de répartition du renflouement entre actionnaires et créanciers. 

Les autorités ont montré leur réactivité avec le cas en Autriche puisque l’application de cette nouvelle directive s’est faite en un weekend. C’est un point positif pour éviter à la faillite d’une banque et à plus grande échelle pour se prémunir contre la chute du système bancaire en Zone Euro.

C’est la Banque Centrale Européenne qui est en charge de la surveillance des banques au sein de la Zone Euro et de l’Union Européenne. Si elle détecte un risque de faillite auprès d’une des banques, la BCE averti la Commission Européenne et l’Etat concerné. Ces deux entités se réunissent alors au sein d’un Conseil de résolution unique et doivent être d’accord pour mettre en application le plan de renflouement. Si le plan est jugé insuffisant ou ne satisfait pas l’une des deux parties, des discussions s’engagent. Si le plan est accepté (comme dans le cas de l’Autriche), il est mis en application.


Le fond de résolution Européen



Si la méthode du renflouement interne auprès des actionnaires et créanciers est insuffisante pour éviter la faillite d’une banque, les autorités Européennes ont crée un fond de résolution Européen.

Ce fonds doit atteindre les 55 milliards en 2024 et sera approvisionné pour moitié d’ici la fin 2015 par les différentes banques de l’Union Européenne. On ne connait pas encore les différentes modalités mais les contributions devraient se faire au prorata de la taille des différentes banques et du poids de l’Economie de chaque pays au sein de le l’Union Européenne

Ce fonds devrait avoir la possibilité d’ici la fin de l’année de pouvoir emprunter sur les marchés financiers.


Système de garantie des dépôts.



Afin d’éviter un mouvement de panique des épargnants en cas de risque de faillite d’une banque, le texte de lois sur la garantie des dépôts bancaires a été remis au gout du jour. 

Tous les épargnants disposant d’un compte jusqu’à 100 000€ seront intégralement remboursés en cas de faillite de la banque. Le délai de remboursement devrait passer à une semaine d’ici à 2024.

Ce sont les banques elles même qui vont progressivement alimenter ce fonds de garantie des dépôts qui doit atteindre 43 milliards d’Euros en 2024.

Les limites du plan européen de protection du système bancaire

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Fonds insuffisants

: Dans le cas d’une faillite éventuelle d’un établissement bancaire d’un pays dont le poids économique est faible au sein de l’Union Européenne, ou s’il s’agit d’un établissement bancaire de petite taille, le plan Européen devrait parfaitement être capable de contrer la faillite. Nous l’avons vu récemment avec le cas de l’Autriche, le système fonctionne et est réactif.

En revanche, que se passera t-il si une banque majeure de la Zone Euro fait faillite comme cela a été le cas en 2008 avec la crise aux Etats Unis ? Pour rappel, le Trésor Américain a du débourser 245 milliards de dollars pour sauver ses banques et éviter l’effondrement du système bancaire (plan Paulson). Bank of America et Citigroup ont reçu à elles seules près de 45 milliards de dollars. Mais ce sont les chiffres officiels….

Un rapport de la FED a été rendu public indiquant qu’elle aurait versé pas mois de 460 milliards de dollars aux banques pour éviter l’effondrement du système bancaire. Bank of America aurait ainsi reçu 86 milliards de la FED, soit 131 milliards en tout (avec le Plan Paulson).

Le fond de résolution Européen sera lui doté de seulement 55 milliards en 2024…. Si une banque telle que BNP PARIBAS venait à faire faillite, je doute que ces 55 milliards soit suffisant même si on ajoute l’application du renflouement interne. Et je parle la que d’une seule banque mais on sait très bien que si une grande banque est en difficulté financière, de nombreuses autres connaissent le même sort…. C’est le risque systémique, toutes les banques sont plus ou moins liées économiquement et financièrement.

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Les épargnants

: La majorité des personnes disposent d’un compte bancaire inférieur à 100 000€ mais qu’en est-il pour les autres ? Si une nouvelle crise bancaire intervient, les autorités vont encore une fois saisir l’épargne sans aucune contrepartie comme cela a été le cas lors de la crise Chypriote…. C’est un véritable racket. Aucune mesure n’a été prise sur ce point…. Ah si il y a le pacte sur l'Union Bancaire qui autorise justement les autorités à le faire (Bail in).

Conclusion



Sur la forme, toutes ces mesures sont bonnes pour améliorer la protection contre un éventuel effondrement du système bancaire au sein de l’Union Européenne. 

Sur le fond, ces mesures sont insuffisantes. Certes, elles permettent aux autorités d’être plus réactives pour répondre à une faillite bancaire mais en cas de crise majeure, la dotation du fond de résolution est largement insuffisante. Et nulle doute que dans ce cas, ce sont les épargnants (vous et moi) qui vont payer l'addition comme la loi l'autorise....

Ces mesures permettent d’éteindre un départ de feu, mais une fois l’incendie déclarée, les Etats (et donc nous) devront une nouvelle fois renflouer les banques. Une chose est sur, ça va arriver encore une fois, reste à savoir quand….

S’il y a une chose à réformer, c’est l’activité des banques. Elles ont une impunité totale. Elles reproduisent les mêmes erreurs qu’avant la crise de 2008 et les autorités laissent faire….. Vive la politique ! 

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