Facebook est-il survalorisé ?

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L’introduction en Bourse de Facebook en 2012 a donné des sueurs froides à Marc Zuckerberg. En quelques mois, le cours est passé de 38$ (son prix d’introduction) à 17,55$ l’action, soit un cours divisé par 2. Les investisseurs se posaient alors des questions sur la valorisation de Facebook. Au prix d’introduction, Facebook était valorisé 104 milliards de dollars. Pour de nombreux analystes, l’action Facebook était largement survalorisée, on a alors parlé d’un véritable fiasco. Pourtant, aujourd’hui, l’action Facebook cote 94$ et vaut plus de 260 milliards de dollars. Cette valorisation est-elle justifiée ?


Le plus grand réseau social du monde



En octobre 2012, Facebook passait le cap des 1 milliard de membres actifs sur un mois . En janvier 2015, on totalisait 1,441 milliard de membres, soit 44% de hausse en à peine plus de 2 ans. Le nombre d’utilisateurs actifs en journalier atteint lui 936 millions. Voici la répartition du nombre de membre actifs en mensuel par zone géographique :


nombre utilisateur facebook
Il faut savoir que dans le monde, 2.078 milliards de personnes sont des utilisateurs de réseaux sociaux et 3.010 milliards de personnes ont accès à internet (cf les réseaux sociaux en chiffres). 69% des utilisateurs des réseaux sociaux sont donc actifs sur Facebook et près de 48% des personnes ayant accès à internet ont un compte actif sur Facebook. C’est dire l’ampleur et la renommée de Facebook dans le monde. C’est le réseau social de référence et le potentiel de croissance est encore gigantesque quand on sait que la population mondiale est de 7.210 milliards.

utilisateur actif facebook

nombre utilisateurs actifs facebook
La croissance des utilisateurs actifs de Facebook est soutenue comme le montre le graphique ci-dessus. En 2013, la croissance était de 16.28% et de 13.43% en 2014. On note toutefois un fort ralentissement du taux de croissance d’utilisateurs actifs puisqu’en 2012, celui çi était de 24.97% et de 38.98% en 2011.

Ce ralentissement semble inéducable mais est loin d’être effrayant. Facebook capte déjà une grande partie du taux de croissance du secteur des réseaux sociaux. En 2014, le taux de croissance du nombre d’utilisateurs de réseaux sociaux était de 12% (221 millions de personnes) et Facebook à gagné 13.43% d’utilisateurs réguliers (165 millions).


Facebook alias big brother



Si Facebook est valorisé aussi chère, ce n’est pas pour son nombre d’utilisateur. En effet, le réseau social est entièrement gratuit et Facebook ne tire aucuns revenus directs ou presque de ses membres. En revanche, les revenus indirects sont astronomiques. Les revenus de Facebook sont liés à l’exploitation de vos données personnelles.

Sur Facebook, vous avez accès à de nombreux réglages pour rendre votre profil plus ou moins public pour les membres du site et vos amis. Vous choisissez ce que vous voulez montrer, et à qui vous voulez le montrer. Ce sont tous les paramètres de confidentialité. En revanche, il y a une chose que vous ne pouvez pas faire, c’est cacher vos données personnelles auprès de Facebook lui-même. 

Sur Facebook, tout est enregistré, tout est stocké sur leur serveur. Il y a peu, un juriste de 24ans, Max Schrems a demandé a Facebook son dossier complet. Il a reçu un dossier de 1222 pages…. Facebook collecte vos données personnelles sur 3 niveaux :

- Informations déclaratives : Ce sont les informations que vous renseignez manuellement comme votre âge, votre sexe, votre niveau d’étude, votre travail, vos goûts, votre école,….

- Interactions sur le site : Tout ce que vous faites sur Facebook est enregistré et stocké. Tout d’abord, il y a toutes vos interactions visibles comme les likes, les photos, les messages sur les walls, votre statut…. mais Facebook est loin de s’arrêter la. Il stocke également tout ce qui n’est pas public tels que vos messages personnelles, vos photos supprimés, vos demandes d’amis refusés…

- Activité en dehors de Facebook : Que vos interactions sur le réseau social soient stockés et utilisés par Facebook, à la limite on peut le comprendre et on l’accepte, c’est le prix de la gratuité. Tous les utilisateurs le savent. En revanche, ce qui l’est beaucoup moins, c’est que Facebook collecte et utilise des informations collectés en dehors de sa plateforme. Pour cela, Facebook utilise plusieurs méthodes. Il y a tout d’abord des balises qui permettent à Facebook de savoir quels sites vous avez visité après être allé sur le réseau social. Mais l’arme ultime reste l’application pour smartphone. En l’utilisant, vous autorisez Facebook à accéder à toutes les données de votre téléphone telles que votre localisation (vous êtes géolocalisé à chaque prise de photo…), vos SMS, vos photos, vos historiques d’appels et de navigation, vos applications installés mais aussi votre micro et votre caméra….. Quand on sait que le nombre d’utilisateurs actifs mensuels sur mobile est de 1.248 milliard, je vous laisse imaginez la quantité de données collectées….

Toutes ces informations sont stockées sur les serveurs de Facebook et peuvent ensuite être utilisées librement par la firme. Les agences de renseignements en savent beaucoup moins sur vous que Facebook… Big brother en personne !


La publicité, le cœur de business de Facebook pour le moment….



A l’heure actuelle, pour estimer la valeur des informations personnelles de Facebook pour chaque utilisateur, on peut diviser la capitalisation boursière par le nombre d’utilisateurs. Lors de l’introduction en Bourse en 2012, ca nous donne 111$. Aujourd’hui, on est à 183$. C’est votre valeur marchande sur le net.

Cela parait énorme et peu à la fois. 183$ pour tout savoir de la vie d’un individu, c’est beaucoup. A titre de comparaison, des brokers peu scrupuleux nous avaient contactés il y a quelques années pour nous acheter la base de données Tribuforex. Il nous proposait 0.50 centimes par email, mais cela pouvait monter jusqu’à 2€ si on leur fournissait le téléphone, le nom et prénom. Ne vous inquiétez pas, vous avons refusé.

183$ c’est donc beaucoup quand on sait ce que cela peut rapporter. C’est d’ailleurs tout le nerf de la guerre du big data. Ce qui vaut de l’argent ce n’est pas les données personnelles elle-même, c’est la capacité à les analyser. Facebook penche depuis des années sur le meilleur moyen de les exploiter. Il est impossible de savoir toutes les utilisations qui sont faites de ses données personnelles.

Pour le moment, tous les revenus (ou presque) de Facebook sont tirés de la publicité. Les annonceurs sont nombreux à vouloir faire de la publicité sur des profils ciblés (par exemple, toutes les personnes intéressés par l’analyse technique). Facebook peut ainsi vendre à prix d’or des encarts publicitaires sur son réseau social. 


benefice facebook
Comme on peut le voir sur ce graphique, le chiffre d’affaire de Facebook est dans une tendance haussière. Sur le premier trimestre 2015 , il était de 3.543 milliards de dollars, soit une progression de 40% en un an. L’année précédente en 2013, la croissance était de 70%....

Sur l’année 2014, ca fait tout de même un chiffre d’affaire de 12.47 milliards de dollars pour 2.93 milliards de bénéfice. En 2013, le chiffre d’affaire était de 7.87 milliards de dollar pour 1.5 milliard de bénéfice.


L’action Facebook est-elle survalorisée ?



Je vous le disais, à l’heure actuelle, un utilisateur sur Facebook est valorisé 183$ (capitalisation boursière / nombre d’utilisateurs). Même si le cours de l’action Facebook plongeait à son cours d’introduction en Bourse de 38$, cela donnerait une valeur par utilisateur de 69$ (100 milliards / 1.441). 
Jetons maintenant un œil au revenu de Facebook par utilisateur : 


revenu facebook
En 2014, un utilisateur a rapporté en moyenne 9.45$ par an. A la fin 2014, l’action Facebook valait 200 milliards de dollars, pour un 1.3993 milliard d’utilisateurs, soit 142$ l’utilisateur.

En 2013, un utilisateur a rapporté en moyenne 6.81$ par an. Fin 2013, l’action Facebook valait 150 milliards, pour 1.228 milliard d’utilisateurs, soit 122$ l’utilisateur. 

En 2012, un utilisateur a rapporté en moyenne 5.32$ par an. Fin 2013, l’action Facebook valait 85 milliards, pour 1.056 milliard d’utilisateurs, soit 80$ l’utilisateur. 80/5.32 = 15. 

Comparons maintenant les taux de croissance des revenus réels par utilisateur et de la valeur boursière d’un utilisateur :

Entre 2013 et 2014, la valeur d’un utilisateur a pris 77.5% (142 contre 80) pour une hausse réelle de revenu par utilisateur de 77% (9.45 contre 5.32)…. La valorisation boursière de l’action Facebook est donc étroitement liée à la croissance du revenu moyen par utilisateur. Avec les plus hauts que connaissent l’action Facebook en 2015, les investisseurs anticipent déjà une hausse du revenu réel par utilisateur et pour le moment, c’est bien parti quand on voit les résultats du premier trimestre 2015. En moyenne, la valeur boursière d’un utilisateur est 15 fois supérieure aux revenus qu’il génère depuis 3 ans. C’est énorme et de ce point de vue la, l’action Facebook est largement survalorisé.


L’exploitation des données personnelles : une mine d’or pour Facebook



Juger de la valorisation de Facebook par cette méthode est une vision très réductrice. En effet, pour le moment Facebook se limite à l’aspect publicitaire mais il pourrait aller bien plus loin avec l’exploitation des données relationnelles….

Si tous les investisseurs achètent massivement l’action Facebook, ce n’est pas pour la croissance de son chiffre d’affaire actuel, mais pour la valeur de ses actifs. Les actifs de Facebook, ce sont toutes les données collectées par le réseau social sur l’ensemble de ses utilisateurs.

Une étude du Boston Consulting Group avait valorisé les données personnelles collectée en Europe uniquement à près de 315 milliards d’euros. Cette étude a été réalisée en 2012…. Il y avait à l’époque beaucoup moins d’utilisateurs et on ne parle que de l’Europe. A l’heure actuelle, Facebook est valorisé 260 milliards, soit à peine la valeur des données personnelles européennes….

Facebook dispose d’une base de données sans équivalent sur les habitudes, les goûts, les opinions, les comportements de ses utilisateurs. Pour le moment, Facebook se limite à l’aspect publicitaire mais il cherche à exploiter toutes ces données relationnelles entre ses membres, à anticiper les tendances, à savoir qui apprécie quoi et qui partage quoi…. Quand on connait le mimétisme dans la consommation, imaginez le potentiel…. C’est tout l’objectif du big data. 

Si Facebook pouvait exploiter correctement ses données avec le big data, son cours de bourse s’envolerait. Le problème, c’est qu’il faut d’une part être capable de les analyser (ce que Facebook devrait réussir à faire dans les années à venir) mais aussi ne pas s’attirer les foudres de ses membres. Les scandales sur l’utilisation de ses données sont nombreux avec Facebook mais pour le moment, les internautes n’en tiennent pas rigueur au réseau social. Tant que cela sera le cas, cela laisse le champ libre à Facebook pour poursuivre sa croissance sans limites…. Quand on voit que le peuple Français à accepter une loi sur le renseignement portant atteinte à la vie privée, on se dit que Facebook à de beaux jours devant lui dans le monde du big data !

Facebook a déjà commencé effectuer plusieurs tests de comportements sur ses membres. Pendant une semaine, Facebook avait manipulé les informations exposées sur les walls de 700 000 utilisateurs. Il en est ressorti que ceux étant exposés à des contenus positifs avait un meilleur moral que ceux exposés à des contenus négatifs. Et on le sait, dans le milieu de la consommation, le moral joue énormément. Facebook a le pouvoir d’influencer des populations tout entière tout comme Google avec son moteur de recherche. 

Pour juger de la valorisation de Facebook, il faut donc se poser une question simple : Croyez-vous ou non au Big data ? Si oui, Facebook n'est pas survalorisé. Si vous n’y croyez pas, alors oui, Facebook est largement survalorisé.

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